(Texte écrit en 2004)
Il est mort il y a dix ans. Il avait 22 ans. Il serait aujourd’hui dans sa 33ème année.
Vous l’avez peut-être connu, rencontré, approché, cotoyé?
Ceci n’est ni une commémoration, ni une célébration. ni un pélerinage. Il ne faut donc ni stèle, ni catafalque, ni cénotaphe.
Cet endroit est une simple place.
Vous pouvez y faire une pause ou une halte pour y regarder passer le temps, ou bien encore y déambuler en méditant ou en rêvant sur les contingences de l’existence.
Il n’y faut n’y fleurs, ni couronnes. Ni myrrhe, ni encens.
On pourrait se dire : A quoi peut-il bien servir, dix ans après, de ravivier le souvenir d’une perte dérisoire et terrible et d’en ranimer l’écho?
Le passé vaut-il d’être rappelé?
N’est-il pas préférable de laisser le temps faire, à la sauvette, son oeuvre (comme il commettrait un crime…) en couvrant progressivement d’oubli les zones et les méandres ténébreux de la vie?
Ce serait, à vrai dire, si commode mais aussi tellement absurde !
Quoi donc ! Offrir à la mort une victoire sur un plateau d’argent alors qu’elle a, d’un trait de faux, exterminé des promesses de moissons dont il ne reste rien? Que des regrets et des chimères?
C’était trop difficile de s’y résoudre.
Alors voici. Vous êtes accueillis ici pour composer, en vrac, un bouquet avec ce qu’il reste de ce que la mort a dispersé aux confins du néant : bribes de souvenirs ou bien pensées impromptues, voire saugrenues.
Chacun pourra ainsi, à son gré, humer à lents traits les senteurs douces amères de ce vin d’assemblage issu d’un temps révolu…
Entrelac réticulé de mémoires qui contribuera peut-être à tisser des liens invisibles, ténus, mais vivaces entre les vivants.
Cette manière de faire, avec malice, la nique au temps, ne lui aurait pas déplu.
La porte est ouverte, n’hésitez pas à laisser un mot en partant… ou même un murmure chuchoté à demi-mot…